28 Novembre 2016

Marie-Noëlle Favier

POPULARISER LA SCIENCE et irriguer le territoire national

Le Ministre Hubert Curien, qui a développé une politique volontariste pour mailler le territoire national de laboratoires de recherche, était également convaincu de la nécessité d’irriguer les régions en matière de « popularisation de la science », comme il aimait à le dire.

Peut-être avait-il été marqué, comme président de l’AMCSTI, par le dynamisme des acteurs régionaux et par la vitalité des projets nés dans la mouvance des Assises et de la Loi sur la Recherche de 1982. En tout cas, il portait intimement cette conviction, de l’obligation pour les chercheurs de partager leurs savoirs, ‘’il est bon que la science sorte des lieux ou elle s’élabore’’ déclarait-il à la première édition du festival des sciences de Chamonix, en 1991.

Il avait aussi conscience de l’importance de rééquilibrer le paysage national, le poids des établissements nationaux et, singulièrement celui de la Cité des sciences et de l’Industrie, risquant d’obérer les projets en région. C’est pourquoi, il s’est battu pour inscrire les moyens de ce lourd équipement aux charges communes de l’Etat et consacrer les crédits de son ministère, aux projets plus modestes et créatifs, initiés par les associations et les collectivités territoriales.

Ce fut le cas pour le réseau des Centres de culture scientifique, technique et industrielle, créés pour offrir un cadre de dialogue et d’expérimentations autour des sciences et de la technologie. Le Ministre a célébré les dix ans du premier CCSTI, celui de Grenoble, créé en 1979 ; inauguré notamment ceux du Nord-Pas-de-Calais, de Poitiers, le Jardin des Sciences à Strasbourg, la Maison de l’innovation, à Clermont-Ferrand, l’Espace des sciences à Rennes, dont il suivra attentivement la destinée.  Il encourageait en particulier les lieux portés par des scientifiques eux-mêmes, comme le Musée des Eyzies, celui de Tautavel, le Géodrome d’Orléans. De cette dynamique  naîtront également Océanopolis à Brest, Nausicaà à Boulogne-Sur-Mer et la Cité de l’Espace à Toulouse.

Tous ces projets ont pu voir le jour grâce aux financements des contrats de plan Etat-Région. Une ligne spécifique « culture scientifique et technique » fut même créée par la Datar. Et le ministre ne manquait pas d’inciter les DRRT, sur lesquels il s’appuyait beaucoup pour sa stratégie régionale, à faire émerger des dossiers en ce sens.

Fidèle à son émerveillement  d’enfant, au Palais de la Découverte, Hubert Curien ne manquait pas une occasion d’accompagner ou de valoriser par sa présence les actions de sensibilisation des jeunes, il appréciait les expérimentations, les Expo Sciences régionales, les lancement de fusées de Planète sciences, les clubs Inserm jeunesse, adossés aux centres de recherche en région  et considérait que l’astronomie et les planétariums étaient un bon vecteur pour stimuler l’appétence des jeunes pour la science et les inciter à y consacrer leur avenir. Là aussi, les planétariums de Vaulx-en-Velin, de Cappelle-la-Grande, de Pleumeur-Bodou, de Strasbourg, témoignent de cette politique d’essaimage.

Cette volonté de diffusion nationale s’est bien sûr parfaitement incarnée dans la ‘science en fête’ devenue depuis la Fête de la science, soutenue politiquement et médiatiquement, dés 1992, par un Ministre qui s’est réjoui du succès immédiat de cette manifestation qui perdure, 25 ans après, portée par les chercheurs, les médiateurs, les associations, les organismes de recherche, les universités, partout en France.

Tous ces exemples montrent à quel point, le  ministre convaincu et bienveillant qu’était Hubert Curien, a incarné, par conviction et volontarisme, une politique éclairée et regrettée de partage des savoirs.

Marie-Noëlle Favier

  •   Chef du département culture scientifique au Ministère de la Recherche de 1984 à 1998
  • Directrice de la communication à l'IRD (Institut de recherche pour le développement)